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Taxe sur les comptes-titres : l’heure des déclarations et des restitutions

Par François Collon

Mardi 21.05.19

La loi du 7 février 2018 a instauré en droit belge une taxe sur les comptes-titres de 0,15 % que nous avons déjà commentée ici. Si, dans la plupart des cas, cette taxe est prélevée par la banque belge auprès de laquelle le compte est détenu, différents cas peuvent se présenter dans lesquels cette taxe est perçue sur la base d’une déclaration que le contribuable doit établir lui-même.


Dans quels cas une déclaration ou une demande de restitution doit-elle introduite ?

1.

La taxe sur les comptes-titres est en principe perçue au moyen d’un prélèvement à la source opéré par l’intermédiaire belge auprès duquel le compte-titres est détenu. Si le compte-titres est détenu auprès d’une banque étrangère, ce prélèvement peut être effectué par un représentant responsable de la banque étrangère agréé par le Ministre des Finances

A défaut de prélèvement à la source, la taxe est perçue sur la base d’une déclaration ad hoc que le contribuable doit établir lui-même. Il s’agit d’une déclaration spécifique dont le modèle figure ici.

2.

Le prélèvement effectué par la banque s’opère en principe sur une base consolidée. La banque doit consolider les valeurs moyennes des « instruments financiers imposables » détenus sur les différents comptes-titres dont le contribuable est titulaire pour déterminer s’il convient ou non d’appliquer la taxe. Si le seuil de 500.000 EUR est atteint, elle doit automatiquement et obligatoirement procéder au prélèvement à la source.

Si le montant consolidé auprès d’une même banque n’atteint pas 500.000 EUR, la taxe peut néanmoins être prélevée à la source par la banque sur demande expresse du détenteur du compte-titres, et ce indépendamment de la valeur moyenne des « instruments financiers imposables ». Ce sera le cas notamment si ce contribuable détient plusieurs comptes-titres auprès de plusieurs banques et qu’il sait que la valeur moyenne totale estimée des « instruments financiers imposables » sur ces comptes ouverts auprès de différentes banques dépassent 500.000 EUR. A défaut de faire cette demande de retenue par la banque, il appartiendra le cas échéant à ce contribuable d’établir la déclaration ad hoc et d’effectuer lui-même le versement du montant de la taxe.

A l’inverse, si le contribuable a opté pour le prélèvement de la taxe mais qu’il s’avère que celle-ci n’était pas due (parce que le montant consolidé des valeurs moyennes figurant sur ces différents comptes ne dépassait pas 500.000 EUR), il pourra introduire une demande en restitution de la taxe dont le modèle figure ici.

3.

Une déclaration ou une demande de restitution de la taxe peut se présenter également en cas de comptes en indivision ou démembré.

Chaque indivisaire ou titulaire d’un droit réel démembré sur le compte sera considéré comme « titulaire » au sens de la loi.

La loi prévoit que la part de chaque titulaire est présumée de manière non-irréfragable être « proportionnelle » au « nombre de titulaires enregistrés » sur les comptes-titres. Ainsi en présence d’un usufruitier et de trois nus-propriétaires, on considérera qu’il y a quatre titulaires et la valeur moyenne du compte sera divisée par quatre pour apprécier si la taxe est due.

Il est néanmoins possible de renverser cette présomption en postulant l’établissement de la taxe sur la base « légale ou contractuelle ».

Prenons l’exemple d’un compte d’une valeur moyenne de 2.400.000 EUR détenu en indivision par A, B, C et D, chacun d’eux ne disposant d’aucun autre compte. La banque percevra en principe la taxe dans le chef de chacun d’eux en divisant la valeur moyenne par quatre, soit 600.000 EUR. Chaque coindivisaire sera donc tenu de payer 900,00 EUR. S’il apparaît qu’en réalité, A détient 40 % du compte et les autres indivisaires 20 % chacun, seul A sera amené à payer la taxe sur 960.000 EUR, soit 1.440 EUR alors que B, C et D échapperont à son paiement.

Lorsque le titulaire se charge d’établir la déclaration ad hoc, le renversement de la preuve intervient dans la déclaration elle-même en utilisant le « volet b » de la déclaration. Il s’agit d’une déclaration « conjointe » émanant de toutes les personnes concernées et, dans ce cas, « chaque co-bénéficiaire dans l'indivision, chaque usufruitier ou chaque nu-propriétaire, de même que le titulaire, est tenu solidairement pour le paiement de la taxe » et doit signer cette déclaration.

Si la taxe a été retenue à la source et payée par la banque, il faut alors en demander la restitution au moyen du formulaire de restitution en utilisant le « volet b ». S’agissant d’une demande « conjointe », chaque co-bénéficiaire dans l'indivision, chaque usufruitier ou chaque nu-propriétaire devra la signer.


Quand la déclaration doit-elle être introduite et la taxe payée ?

4.

Le titulaire d’un compte-titres pour lequel la taxe n’a pas été prélevée doit introduire une déclaration « au plus tard le dernier jour où les déclarations électroniques à l’impôt des personnes physique doivent être introduites ». Ce délai vaut tant pour la déclaration individuelle que pour la déclaration conjointe et quelle que soit la forme de la déclaration (voyez le point 7 ci-après). S’agissant de la taxe due pour l’année 2018, la date-limite pour l’introduction de la déclaration est donc le 11 juillet 2019 et la taxe devra être payée pour le 31 août 2019.


Quand la demande de restitution doit-elle être introduite ?

5.

La demande en restitution doit être introduite au plus tard le dernier jour ouvrable de l’année qui suit celle de la fin de la période de référence. Pour l’année 2018, la période de référence couvre la période du 10 mars 2018 et se termine le 30 septembre 2018 de sorte que la demande doit être introduite au plus tard pour le 31 décembre 2019.


Quelques considérations pratiques supplémentaires…

6.

Le processus de déclaration et de demande de restitution mis en place par l’administration fiscale a pour effet que, selon les cas, plusieurs déclarations ou plusieurs demandes de restitution devront être effectuées par un même contribuable.

Ainsi, un contribuable belge qui disposerait de deux comptes titres (pour une valeur consolidée supérieure à 500.000 EUR), l’un étant détenu seul, l’autre conjointement, auprès d’une banque étrangère n’ayant pas désigné de représentant en Belgique, devra procéder à l’établissement d’une déclaration « classique » à la taxe pour le compte qu’il détient seul et à l’établissement d’une déclaration conjointe, cette dernière devant être signée en outre par l’ensemble des autres titulaires du compte.

7.

La déclaration à la taxe sur les comptes-titres à la taxe doit en principe être effectuée de manière électronique par le biais de la plate-forme MyMinfin.

Le déclarant est toutefois dispensé de l’obligation d’introduire sa déclaration par la voie électronique dans les cas suivants :

• s’il fait usage d’une déclaration simplifiée à l’impôt des personnes physiques ;

• aussi longtemps que lui ou, le cas échéant, la personne qu’il a mandatée pour l’introduction d’une telle déclaration, ne dispose pas des moyens informatiques nécessaires pour introduire une déclaration électronique (le mandataire a dans tous les cas la faculté d’introduire la déclaration sous format papier).

Toutefois, le « volet b » relatif aux comptes joints ne peut être introduit que sous format papier et jamais sous format électronique.

Un même contribuable pourrait donc se trouver dans la situation absurde consistant à devoir introduire plusieurs déclarations, certaines sous forme électronique exclusivement et d’autre sous format papier…Pourquoi faire simple ?


Et une obligation déclarative de plus…

7.

Le formulaire de déclaration à l’impôt des personnes physiques relatif à l’exercice d’imposition 2019 (revenus de l’année 2018) qui vient d’être publié impose au contribuable de répondre à la question suivante « avez-vous été du 10.3.2018 au 31.12.2018 titulaire de plus d’un compte-titres visés à l’article 152, 1°, a, du Code des droits et taxes divers ? ». Dans l’affirmative, le contribuable devra cocher la case n° 1072-92 (ou 2072-92 pour son conjoint).

Cette question peut sembler étonnante en ce qu’elle n’impose de déclaration qu’aux contribuables qui détiennent au moins deux comptes-titres. Il faut la comprendre en ce que le risque que la taxe sur les comptes-titres soit éludée en présence d’un seul compte-titre belge est nulle dans la mesure où la banque à l’obligation de retenir la taxe si la valeur moyenne du compte dépasse 500.000 EUR. Le risque n’existe qu’en présence de plusieurs comptes distincts, certains d’entre eux pouvant avoir une valeur moyenne inférieure à 500.000 EUR mais dépasser ce seuil sur une base consolidée. Il n’en reste pas moins que la détention d’un unique compte-titre étranger échappe à l’obligation déclarative alors même que les banques étrangères n’ont pas d’obligation de retenue de la taxe. Comprenne qui pourra…



François Collon
Avocat
Hirsch & Vanhaelst
(f.collon@hvlaw.eu)


Source : DroitBelge.Net - Actualités - 21.05.2019


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