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Vlabel et la société de droit commun

Par G. Vander Cammen (Hirsch & Vanhaelst)

Lundi 31.07.17

Le 27 avril 2017, le fisc flamand (Vlaamse Belastingdienst, ci-après Vlabel) a complété sa position n° 15004 et y a ajouté un nouveau point B relatif aux sociétés de droit commun qui détiennent un portefeuille-titres ou des placements financiers en nue-propriété et usufruit.

Cette position n° 15004 concerne l’article 2.7.1.0.7 du Vlaams Codex Fiscaliteit, (ci-après VCF), qui était anciennement l’article 9 du Code des droits de succession.

Cette nouvelle prise de position s’inscrit dans la volonté du fisc flamand de mettre fin aux planifications successorales réalisées par des donations consenties devant un notaire étranger (principalement aux Pays-Bas et en Suisse). Plus particulièrement, Vlabel entend mettre fin aux donations consenties avec réserve d’usufruit devant un notaire étranger.


1. Rappel : position n° 15004 du 4 avril 2016 : immatriculation scindée de portefeuilles-titres

Le 4 avril 2016, Vlabel avait déjà pris une position fortement contestable relative à l’immatriculation scindée de titres et de dépôt d’argent (n° 15004 point A). Vlabel estime que toutes les immatriculations scindées à partir du 1er juin 2016 qui trouvent leur origine dans une donation avec réserve d’usufruit seront, en principe, soumises à l’impôt de succession lors du décès du donateur. L’impôt de succession sera dû même si ce dernier est resté en vie pendant trois années après la donation (ou sept années en cas de donations d’entreprises familiales). Le nu-propriétaire/héritier ne peut échapper à l’impôt de succession que s’il démontre que cette immatriculation scindée (usufruit/nue-propriété) ne déguise pas une libéralité au sens de l’article 2.7.1.0.7 du VCF. De manière tout à fait contestable, Vlabel estime que cette preuve peut uniquement être rapportée lorsque l’acte de donation a été enregistré.

Concrètement, cette position implique que toutes les donations de portefeuilles-titres ou de dépôts d’argent consenties avec réserve d’usufruit à partir du 1er juin 2016 devront être soumises aux droits de donation si l’on veut éviter que des droits de succession ne soient appliqués au décès du donateur (résident fiscal en Flandre).


2. Position n° 15004 point B du 27 avril 2017 : les sociétés de droit commun

Vlabel vient de compléter la position n° 15004 en y abordant la problématique des sociétés de droit commun (position n°15004 point B).


2.1. Rappel des principes

La société de droit commun (anciennement société civile) est couramment utilisée dans le cadre de planifications successorales de biens mobiliers (portefeuilles-titres, actions de sociétés familiales, œuvres d’art, etc.).

La société de droit commun est indivision conventionnelle constituée par contrat sous seing privé entre deux ou plusieurs personnes. Les associés apportent chacun à la société un patrimoine propre qu’ils décident de gérer conjointement selon les règles définies dans les statuts. Suite à l’apport, chaque associé devient propriétaire de parts indivises.

Les statuts prévoient généralement des règles de gestion pour ce patrimoine ainsi que la nomination d’un gérant qui aura la responsabilité de gérer les actifs de la société de droit commun.

La société de droit commun ne dispose ni d’une personnalité juridique ni d’une personnalité fiscale, elle est dite « transparente ».

En pratique, plutôt que de consentir directement une donation d’un portefeuille-titres, les parents constituent au préalable (avec ou sans leurs enfants), une société de droit commun dont ils sont les gérants. Ceci leur assure un contrôle sur la gestion du patrimoine et ce, même si les parts de la société de droit commun font ensuite l’objet d’une donation aux enfants (en pleine propriété ou en nue-propriété).


2.2. Position de Vlabel concernant les sociétés de droit commun

En raison de l’absence de personnalité juridique et de la transparence fiscale de la société de droit commun, Vlabel estime que le transfert de parts de la société de droit commun doit, pour les droits d’enregistrement ou de succession, être considéré comme le transfert des biens détenus par la société de droit commun.

Par conséquent, l’article 2.7.1.0.7 du VCF pourrait être d’application lorsque l’actif de la société de droit commun est constitué de titres ou de dépôts d’argent et lorsque ceux-ci font l’objet d’une inscription scindée pour l’usufruit au nom du défunt et pour la nue-propriété au nom d’un tiers.

Si l’inscription scindée résulte d’une donation, pour pouvoir échapper à l’application de l’article 2.7.1.0.7 VCF, il faut dorénavant démontrer que cette donation a été soumise aux droits de donation ou aux droits d’enregistrement.

La position de Vlabel a également des implications concrètes au niveau de la gestion des actifs détenus par la société de droit commun et des revenus annuels générés.

Selon Vlabel, si les revenus générés par le portefeuilles-titres ne sont pas distribués mais sont capitalisés au sein de la société de droit commun suite à une décision de l’assemblée générale, ces revenus non distribués seront considérés comme une nouvelle inscription scindée au sens de l’article 2.7.1.0.7 VCF et sont donc soumis aux droits de succession à défaut d’enregistrement.

Il en sera de même si ces fruits sont distribués mais servent à acquérir de nouveaux titres qui seraient inscrits de manière scindée.

Remarquons que ceci vise uniquement les fruits civils (intérêts et dividendes) et que les plus-values ne sont pas visées par cette interprétation administrative.

Par ailleurs, le remplacement des titres initiaux par des titres de même valeur n’est pas considéré comme une nouvelle inscription scindée au sens du VCF.

Cette nouvelle position relative aux sociétés de droit commun n’est applicable que pour les inscriptions scindées réalisées à partir du 1er juin 2017.


2.3. Conséquence pratique de la position n° 15004.B

a. Dorénavant, seules les donations de parts de sociétés de droit commun consenties avec réserve d’usufruit et qui sont soumises aux droits d’enregistrement en Belgique pourront être opposées à Vlabel pour éviter l’application de l’article 2.7.1.0.7 du VCF et les droits de succession.

b. Tant pour les sociétés de droit commun existantes que pour celles qui seraient constituées après le 1er juin 2017, les fruits civils (intérêts et dividendes) devront être distribués chaque année à l’usufruitier. En cas d’incorporation des fruits au capital de la société de droit commun, Vlabel considère qu’il y a une nouvelle inscription scindée : l’article 2.7.1.0.7 du VCF sera d’application et des droits de succession seront dus.

c. Les fruits civils qui auraient mis en réserve et incorporés au capital avant le 1er juin 2017 ne sont pas concernées par la position n°15004.B.





Geoffroy Vander Cammen
Avocat
Hirsch & Vanhaelst





Source : DroitBelge.Net - actualités - 31 juillet 2017


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