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Droits d'auteur: un environnement contraint n'exclut pas la créativité, bien au contraire !

Par Mikaël Gossiaux & Haythem Khamri

Vendredi 21.04.23

Dans son arrêt du 24 mars 2023, la Cour de cassation a confirmé que le travail rédactionnel de l’avocat pouvait répondre à l’exigence d’originalité requise pour bénéficier de la protection du droit d’auteur.

Après avoir rappelé les principes généraux (les droits d’auteurs sont des revenus mobiliers et conservent irréfragablement cette qualification, sauf dans l’éventualité et dans la mesure où ils excèdent 37.500 € par an, soit un montant indexé à 70.220 € en 2023), la Cour procède à l’examen des conditions requises pour qu’une œuvre bénéficie de la protection de la loi du 30 juin 1994 relative au droit d’auteur et aux droits voisins, abrogée par la loi du 19 avril 2014 et de la Convention de Berne de 1886 sur la protection des œuvres littéraires et artistiques.

Ensuite, la Cour se penche sur la notion d’originalité, précisant que l’œuvre protégée doit être «une création intellectuelle propre à l’auteur, reflétant sa personnalité et s’exprimant à travers les choix libres et créatifs de l’auteur dans la création de cette œuvre».

S’agissant des œuvres écrites, la Cour estime que les choix libres et créatifs quant aux mots à employer, leur agencement et combinaison dans l’expression de l’œuvre suffisent pour évaluer son originalité.

Le fait que l’œuvre soit produite dans le cadre de l’exercice de son activité professionnelle et que, dans ce contexte, l’avocat doit tenir compte de contraintes (les lois, règlements, règles déontologiques, etc.) ne font pas, en soi, obstacle à la création d’une œuvre protégée.

Cette décision judiciaire écarte donc fermement la thèse administrative selon laquelle les contraintes professionnelles de l’avocat, que ce soit le cadre juridique ou simplement la demande spécifique d’un client, s’opposent ipso facto à la création d’une œuvre originale.

Cette décision aura incontestablement un impact au-delà de la situation jugée. Les contraintes qui s’imposent à un architecte, un publiciste, un informaticien, etc. n’excluent en effet que très rarement une activité créative.

Au contraire même, cette contrainte est une source d’inspiration, une donnée dont l’auteur tiendra compte et qui l’obligera, dans l’expression de son originalité, à redoubler d’imagination.

Charles Baudelaire écrivait très justement «parce que la forme est contraignante, l’idée jaillit plus intense».




Mikaël GOSSIAUX
Avocat
Haythem KHAMRI
Juriste
Cabinet Hirsch & Vanhaelst




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