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Qui sera la cible d’un contrôle fiscal en 2022 ? Loueurs Airbnb, tremblez !

Par François Collon (Hirsch & Vanhaelst)

Lundi 14.02.22

Rompant depuis maintenant trois années avec une tradition de transparence qui l’honorait, l’administration fiscale belge a cessé d’annoncer les secteurs ou les groupes cibles qu’elle entendait contrôler plus spécifiquement.

Interrogés à cet égard dans l’Echo du 11 février 2022, plusieurs experts fiscaux ont néanmoins tenté de relever les thématiques qui seraient plus particulièrement visées. Sans grande surprise pour celles et ceux qui suivent l’actualité fiscale, ils y évoquent les droits d’auteur, les avoirs à l’étranger, les assurances-groupe et les frais professionnels. Rien de neuf sous le soleil.

Il y est aussi question, à nouveau, des « multi-propriétaires », cette catégorie de contribuables aux contours flous dont l’administration fiscale belge semble toutefois se soucier tout particulièrement. Qui sont-ils ? Tâchons de faire un point sur la question.

Qui sont les multi-propriétaires ?

Pour les biens immobiliers donnés en location à des personnes physiques qui ne les affectent ni totalement ni partiellement à l’exercice de leur activité professionnelle et à tous les autres immeubles, le revenu imposable est le revenu cadastral indexé desdits biens, majoré de 40 %.

Le revenu cadastral n’est pas un véritable revenu, mais un revenu fictif qui correspond au revenu annuel moyen net qu'un immeuble procurerait à son propriétaire. Il s’agit donc de la valeur locative moyenne nette d’un an du bien immeuble au moment de référence. Ce moment de référence est le 1er janvier 1975. Pourquoi cette date ? Car l’établissement et l’actualisation des revenus cadastraux nécessitaient un travail de recensement effectué tous les dix ans et mieux connu sous le nom de « péréquation ». Faute de budget suffisant, la dernière péréquation générale date de 1975. Après cette date, les revenus cadastraux n’ont plus été réévalués de manière générale mais simplement indexés. Les valeurs immobilières ayant plus progressé que les prix à la consommation, les revenus cadastraux établis en 1975, quand bien même seraient-ils indexés, aboutissent à ce jour à des valeurs locatives moyennes nettes particulièrement faibles.

Dès lors que la fiscalité immobilière à l’impôt des personnes physiques se fonde essentiellement sur des revenus cadastraux faibles et non sur les loyers réellement perçus, elle s’avère donc très attrayante. Le ministre des Finances Vincent Van Peteghem a d’ailleurs cité cette situation comme l’un des enjeux d’une future réforme fiscale qui verrait les propriétaires imposés sur les loyers réellement perçus.

Le caractère très favorable de la fiscalité immobilière sur les revenus locatifs résidentiels à l’impôt des personnes physiques a amené nombre de contribuables à investir massivement dans l’immobilier. Voici nos multi-propriétaires !

Que doivent-ils craindre ?

Le risque dans le chef de ces multi-propriétaires réside dans une requalification de leurs revenus immobiliers (faiblement imposés) en revenus professionnels imposés au taux progressif par tranches de l’impôt des personnes physiques (pouvant atteindre, et rapidement, 50 %).

Qui est plus à risque ?

Relevons d’abord que ce n'est pas toujours le montant investi dans l'immobilier ou le nombre d’immeubles que l'on possède qui est déterminant. Celui qui détient 20 unités locatives n’est donc pas nécessairement plus à risque que celui qui en détient 10.

De prime abord, l’administration fiscale sera attentive à la hauteur des revenus immobiliers par rapport aux revenus professionnels du contribuable. Ceux qui tirent la majeure partie de leurs revenus d’une activité immobilière sont donc plus à risque.

Ensuite, l’administration fiscale aura égard à un faisceau d’éléments, parmi lesquels le nombre d’unités détenues, qui comprendra aussi et surtout la manière dont le patrimoine immobilier a été constitué, géré et financé. Les éléments qui entreront en considération sont : le recours ou non à l’emprunt, l’existence d’une activité professionnelle distincte de l’activité immobilière, la gestion du patrimoine immobilier par un tiers mandaté pour ce faire, etc. Ainsi une personne possédant 20 unités locatives recueillies par voie de succession et gérées par un tiers n’aura en principe guère de souci à se faire. A l’inverse, celui qui détient et gère activement 3 ou 4 unités locatives pour lesquelles il propose des locations touristiques ou de très courte durée, avec ménage et entretien effectués avant et après chaque séjour via, par exemple, une plate-forme telle que Airbnb a probablement plus d’inquiétude à avoir.

Au sujet des locations Airbnb qui, c’est le moins que l’on puisse dire, ont eu le vent en poupe ces dernières années, rappelons que le 22 mars dernier 2021, le conseil de l’Union européenne a formellement adopté la révision (DAC 7) de la directive 2011/16/UE relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal afin d’étendre l’échange automatique d’informations aux plateformes numériques. Les nouvelles règles imposent aux opérateurs de plateformes numériques de déclarer les revenus perçus par les vendeurs (ou loueurs) sur leur plateforme et aux Etats membres d’échanger automatiquement ces informations. Les activités qui devront faire l’objet d’une déclaration comprennent notamment la location de biens immobiliers, y compris à usage résidentiel et commercial, ainsi que tout autre bien immeuble et emplacements de stationnement. Par le biais de cet échange d’informations, l’administration fiscale disposera d’une information précise des revenus locatifs générés par chaque contribuable par le biais de la plate-forme Airbnb.

A bon entendeur !



François Collon
Avocat
Hirsch & Vanhaelst
(f.collon@hvlaw.eu)






Source : Hirsch & Vanhaelst


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