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Compromis de vente vaut vente (suite)



Les droits d’enregistrement sont dus dès qu’il y a accord entre vendeur et acheteur

Si vous envisagez de vendre un bien immobilier qui vous appartient, mieux vaut pour vous, nous l’avons vu (voir la fiche pratique sur l’offre et son acceptation), bien réfléchir avant d’accepter une offre et, a fortiori, de signer le compromis.

Outre que c’est ce compromis qui fixe définitivement vos droits et obligations, de même que ceux de l’acquéreur, il donne également lieu à la perception d’un impôt élevé, dénommé les droits d’enregistrement, qui sont dus dès cet instant, quels que soient en principe les événements ultérieurs qui pourraient survenir et qui auraient pour effet d’anéantir l’accord que vous aviez initialement conclu !

S’ils sont toujours mis à charge de l’acquéreur dans le compromis, cette clause ne lie pas l’administration fiscale qui a le droit de les réclamer tant à vous-même qu’à l’acquéreur, au cas où ils ne seraient pas payés volontairement !

Pour rappel (lien avec les taxes applicables en cas d’acquisition d’un bien immobilier), ces droits sont dans la majorité des cas de 12,5 % du prix convenu sans que la base imposable puisse être inférieure à la valeur du bien.

La loi prévoit qu’ils doivent être payés dans les quatre mois à dater de l’accord des parties (généralement matérialisé par le compromis de vente).

Passé le délai de quatre mois à dater de l’accord des parties contractantes, l’administration fiscale peut réclamer son dû – et s’adresser à cet effet, répétons-le, aussi bien à l’acquéreur qu’à vous-même –, même si l’acte notarié entérinant officiellement cet accord n’est finalement pas passé !

Une exception importante : si le compromis de vente est affecté d’une ou de plusieurs condition(s) suspensive(s), telle celle de l’obtention d’un prêt hypothécaire dans un délai bien précis, les droits d’enregistrement ne seront dus que si cette (ces) condition(s) se réalise(nt) (dans notre exemple l’octroi du prêt).

Toute autre circonstance ultérieure qui aurait pour effet d’altérer l’accord initial entre vous et votre acquéreur ne permet pas en principe d’échapper au paiement des droits. Tel est le cas, notamment, lorsque vous convenez avec l’acquéreur, pour une raison ou pour une autre, d’annuler à l’amiable le compromis, en le « déchirant » ou en prévoyant dans un accord écrit postérieur qu’il doit être considéré comme nul et non avenu.

Il est donc extrêmement dangereux d’agir de la sorte, et ce d’autant plus que le risque que l’administration fiscale soit informée de la survenance d’une vente est beaucoup plus élevé que d’aucuns le croient.


Deux seules possibilités d’échapper au paiement des droits

En réalité, la loi ne prévoit que deux hypothèses bien précises d’exemption de paiement des droits (en fait la loi parle de « restitution ») dans le cas qui nous occupe. Elles imposent toutes deux de recourir à la voie judiciaire.

La première possibilité d’échapper aux droits consiste en l’annulation, par le juge, de la vente. La nullité d’un acte juridique ne peut être prononcée qu’en cas d’irrégularité de cet acte au moment de sa formation. Tel est par exemple le cas de l’erreur qui serait commise par l’acquéreur qui, lors de la signature du compromis, pense avoir acquis un immeuble de bureau, sur la base de vos affirmations ou de celles de votre agent immobilier, alors qu’en réalité, cette affectation est exclue.

Précisons tout de même que pour que l’erreur puisse donner lieu à la sanction de la nullité, il convient (notamment) qu’elle ait un caractère excusable dans le chef de celui qui l’a commise. Autrement dit, si le juge constate, par l’examen des faits qui entourent le litige, qu’en réalité votre acquéreur a agi avec légèreté et qu’il aurait pu ou aurait dû savoir que, dans notre exemple, le bien ne pouvait être utilisé comme bureau, il refusera en principe de prononcer l’annulation du compromis en question, et les droits d’enregistrement seront alors définitivement dus.

La deuxième possibilité d’échapper au paiement des droits consiste en la résolution judiciaire de la vente. A la différence de la nullité qui frappe une irrégularité présente lors de la signature de l’acte juridique, la résolution sanctionne un manquement ultérieur, et plus précisément dans l’exécution de cet acte. En d’autres termes, l’opération juridique est née régulièrement cette fois – il n’y a donc aucune cause de nullité – , mais c’est dans l’exécution des engagements contractuels de l’une ou des parties que le problème surgit. Tel est le cas, par exemple, si votre acquéreur ne paie pas le prix, s’il se rétracte, ou si vous-même revenez sur votre engagement.

Mais cette fois, à la différence de l’action en annulation qui n’est soumise à aucun délai, la demande en résolution doit être introduite dans l’année du compromis, sous peine de déchéance définitive du droit à échapper au paiement.

Vigilance donc !


Les exceptions wallonnes et flamandes

Depuis quelques années, les Région flamande et wallonne ont assoupli le régime qui vient d’être décrit (qui reste donc d’application lorsque le bien se trouve dans la Région de Bruxelles-Capitale).

Dans ces Régions, il est désormais possible en effet de se passer de la procédure judiciaire en présentant au service fiscal local une convention de résiliation amiable de la vente (ce qui implique que les parties doivent se mettre d’accord !), et en payant à cette occasion une taxe d’un montant modique.




Laurent Collon
Avocat au barreau de Bruxelles - Xirius.
Spécialiste agréé en droit immobilier




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