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Que va payer l'assureur pour l'incapacité permanente ?



1. Principes :

Comme vu dans les fiches précédentes, l’incapacité permanente est donc la situation dans laquelle la victime garde des séquelles à vie dont il découle une perte de capacité concurrentielle sur le marché général de l'emploi, et ce compte tenu des caractéristiques socio-économiques du patient (âge, formation professionnelle, possibilités d'adaptation et de recyclage scolaire, etc…). L’indemnisation de cette incapacité s’effectuera sur base de la rémunération de base de la victime au moment de l'accident. Même les petites incapacités (à partir de 1%) doivent être indemnisées.

La rémunération de base correspond à :

• la rémunération à laquelle le travailleur a eu droit (laquelle ne peut être inférieure à celle prévue par la convention collective de travail) ;

• pendant l'année qui a précédé l'accident (si l'année de référence n'est pas complète, on prendra comme base de calcul le salaire journalier d'un travailleur similaire) ;

• en raison de la fonction exercée dans l'entreprise au moment de l'accident.

Le caractère forfaitaire de l’indemnisation « loi » implique que la rémunération de base est limitée à un montant maximum prévu par la loi .


2. Allocations et rentes:

La méthode d'indemnisation de l’I.P. varie selon le taux d'incapacité.

Notons que l’on parle d’allocations avant l’expiration du délai de révision, de rente ensuite (voir infra).

Les règles essentielles peuvent être résumées comme suit :

• Incapacité permanente inférieure à 10% : le paiement de l'allocation, puis de la rente annuelle, non indexée, est effectué par l’intermédiaire du F.A.T, auquel l’assureur a versé le capital correspondant. Il n’est pas possible de solliciter la conversion de la rente en capital, même partiellement. Observons que, du fait de cette non indexation, la valeur financière de la rente diminuera d'année en année inflation).

Pour les taux compris entre 1 et 4 %, l’allocation sera diminuée de moitié ; pour les taux compris entre 5 et 9 %, elle sera diminuée de un quart .

• Incapacité permanente entre 10 et 15% : la victime reçoit une allocation puis une rente payée mensuellement par le F.A.T. Préalablement, l’assureur est tenu de verser au FAT le capital correspondant à la valeur de l’allocation annuelle ou de la rente.

Contrairement aux incapacités inférieures à 10%, il n’y a pas dans ce cas de réduction de l’allocation (autrement dit, le patient qui est atteint de 10% d’IPP perçoit 10% de sa rémunération de base).

Il n’est pas possible d’obtenir la conversion d’un tiers de la rente en capital (voir infra).

• Incapacité permanente de 16% et plus : l'allocation, puis la rente, est indexée et est payée mensuellement par l'assureur-loi.


3 Aide d’une tierce personne :

Dans certains cas, l’état de la victime nécessitera l'aide d'une personne pour effectuer ses tâches quotidienne. L'assureur-loi paiera dans ce cas le coût forfaitaire de cette tierce personne, à concurrence du pourcentage de nécessité retenu . Le taux complémentaire octroyé peut varier de 1 à 50% et s’ajoutera au taux d’IPP retenu sur base des critères définis supra ( atteinte à la capacité concurrentielle ). L’aide d’une tierce-personne n’est octroyée qu’en cas d’incapacités permanentes de travail très importantes.

Le taux d’incapacité global peut ainsi atteindre, dans les cas les plus graves, 150 % (tétraplégiques, etc.).


4. Prothèses

La victime a droit, dans les conditions prévues par la loi, aux appareils de prothèse et d’orthopédie nécessités par l’accident.

La loi ne définit pas ce qu’il y a lieu d’entendre par « prothèse ».
Il appartient donc à la jurisprudence de cerner les contours de cette notion, qui peut être sujette à interprétation dans des cas spécifiques.

Les appareils de prothèse ont été définis comme étant « tout dispositif artificiel, interne ou externe, suppléant une partie du corps ou la fonction remplie par celle-ci et, au sens large, les moyens techniques d’aide ou de remplacement des fonctions perdues ».

Une autre définition en a été donnée par le Cour de Cassation qui, par un arrêt du 23 janvier 1995, considère qu’il y a lieu « d’entendre par appareils de prothèse et d’orthopédie, les moyens d’assistance artificiels dont une personne valide n’a pas besoin et qui, suite à un accident du travail, sont nécessaires pour soutenir ou remplacer des parties du corps déficients ou affaiblies ou pour favoriser l’usage et les fonctions ».

Cas pratiques : quid des aménagements immobiliers nécessaires pour un paraplégique, quid du matériel informatique, ?

La victime a également droit au remplacement ou à la réparation des prothèses endommagées suite à l’accident, et ce même si l’accident n’a pas provoqué de lésion (exemple : bris de lunettes).


5. Traitements (médicaments, kinésithérapie, etc.)

Les frais médicaux nécessités par l’accident restent à charge de l’assureur jusqu’à l’expiration du délai de révision. Au delà, ils sont pris en charge par le FAT pour les accidents survenus avant le 1 janvier 1988 et à charge de l’assureur-loi pour les accidents survenus à partir du 1 janvier 1988.


6. Tiers en capital

La victime peut, à l’expiration d’une période de 3 ans correspondant au délai de révision, demander la conversion d'un tiers de la rente en capital. Cette demande doit faire l'objet d'une décision du Tribunal du Travail qui appréciera souverainement le bien fondé de celle-ci. Le Tribunal du Travail marquera habituellement son accord si la demande est justifiée par la nécessité d’exposer des dépenses « utiles » ( travaux d’aménagement de la maison, remboursements d’emprunts,…) mais pourra refuser la demande de conversion si celle-ci n’est pas ou est « mal » justifiée ( dépenses « inutiles » : voiture de sport, vacances). Ce pouvoir du Tribunal découle du caractère de « protection de la victime » de la loi, également contre elle même…( caractère d'ordre public de la loi)





Pierre Beyens
Avocat au barreau de Bruxelles - van Cutsem Wittamer Marnef & Partners




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