Imprimer cet article


Clause de non-concurrence : dépassement de la durée autorisée possible ?

Guillaume Rue

Vendredi 22.05.15

Des clauses de non-concurrence sont souvent incorporées dans des contrats concernant des cessions de sociétés, des contrats de licences, des contrats de management…

Lors de la rédaction d’une clause de non-concurrence dans un contrat, la prudence est de mise, surtout en ce qui concerne la durée et la portée territoriale et matérielle de celle-ci. En effet, la clause de non-concurrence a pour effet de limiter la liberté du commerce, liberté reprise à l’article II.2 du Code de droit économique. La liberté du commerce a une valeur fondamentale telle dans notre système judiciaire que c’est un principe d’ordre public. Par conséquent, une clause de non-concurrence excessive est, en principe, frappée de nullité.

Cette vision était déjà adoptée par la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 3 février 1971, jugeait que la clause illicite ne pouvait pas être réduite, avec pour conséquence que la clause était nulle (cf. Note 1). Cette tendance stricte de la Cour de cassation était déjouée par la pratique avec l’insertion de clauses de modération. Ces clauses prévoient qu’en cas de nullité de la clause, les parties rechercheront un dispositif légal équivalent ou maintiendront le contrat amputé de nullité partielle.

Dans son arrêt du 23 janvier 2015, la Cour de cassation a rendu un verdict concernant le débat sur les clauses de non-concurrence en cassant un jugement de la Cour d’appel de Gand (cf. Note 2).

Dans cette affaire, une clause de non-concurrence de dix-sept ans figurait dans une convention de cession d’entreprise entre les parties. La convention précisait que les dispositions qui seraient (partiellement ou intégralement) déclarées nulles subsistent pour la partie qui en est autorisée par la loi.

La cour d’appel avait refusé de réduire une clause de non-concurrence avec une durée de dix-sept ans en considérant que la clause était frappée de nullité absolue.

Cette interprétation a été rejetée par la Cour de cassation qui considère que l’intention des parties prime. La Cour de cassation considère ainsi que la nullité de la clause doit être limitée à la partie illicite de cette dernière. La Cour décide donc de donner effet à la clause de modération, en limitant la nullité de la clause de non-concurrence au dépassement non autorisé de la durée de celle-ci.



Guillaume Rue
Avocat au Barreau de Bruxelles



Notes:

1 Cass., 3 février 1971, Pas., 1971, p. 538.

2 Cass., 23 janvier 2015, RG no C.13.0579.N/1, www.juridat.be.


Cet article a été précédemment publié par le même auteur dans le n° 540 du Bulletin Social et Juridique.(www.lebulletin.be)




* *
*


Bookmark and Share