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[EN BREF] Enregistrement d´une télécommunication à des fins de dénonciation

Karen Rosier

Mercredi 12.03.14


Dans un arrêt du 8 janvier 2014 (cf. Note 1), la Cour de cassation s’est prononcée sur la question de la régularité de la preuve obtenue via un enregistrement de télécommunication réalisé à l’insu d’un des interlocuteurs.

Elle énonce tout d’abord que l’interdiction de prendre connaissance et d’enregistrer une télécommunication ne s’applique pas à la personne qui, partie prenante à cette communication, enregistre son contenu avec l’accord, ou même à l’insu, de son interlocuteur.

La Cour énonce, par ailleurs, qu’un tel enregistrement ne viole ni les articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, ni l’article 314bis du Code pénal, dès lors qu’il s’agit d’une utilisation à des fins probatoires par la personne qui, apprenant l’existence d’un crime ou d’un délit, s’acquitte de l’obligation d’en donner avis au procureur du Roi. L’arrêt laisse donc penser que l’appréciation de l’absence de violation de ces dispositions se justifie par rapport à la finalité d’utilisation de l’enregistrement.

Rappelons que dans un arrêt rendu le 9 novembre 2008 (cf. Note 2), elle avait considéré que si le seul fait d’enregistrer une conversation à laquelle on participe soi-même n’est pas illicite du fait qu’il est réalisé à l’insu des autres participants, cet acte peut constituer une violation de l’article 8 de la Convention. La Cour ajoutait que le juge, qui était amené à apprécier si l’usage de cet enregistrement était autorisé, devait inclure dans son jugement le critère des attentes raisonnables de la personne concernée en matière de respect de sa vie privée.

En l’espèce, ce critère des attentes raisonnables n’est donc pas repris pour apprécier l’existence d’une violation de l’article 8 de la Convention. L’arrêt étant assez succinct, on ne connaît d’ailleurs pas les circonstances exactes de cet enregistrement.

Signalons encore que, dans le cadre de l’examen d’un autre moyen au sein du même arrêt, la Cour, faisant implicitement référence à sa jurisprudence dite Antigone, rappelle que si la fiabilité est bien un critère retenu par elle pour déclarer un recours irrecevable, cette cause d’écartement n’a lieu d’être que lorsque la fiabilité est imputable à l’illégalité ou à l’irrégularité de l’acte qui en a permis l’obtention.



Karen Rosier
Assistante à la faculté de droit des FUNDP, chercheuse au Centre de Recherches Informatique et Droit (Crid), avocat au barreau de Namur



Notes:

1) Cass., 2e ch., 8 janvier 2014, R.G. n° P.13.1935.F.

2) Cass., 9 septembre 2008, R.G. no P.08.0276.N, www.juridat.be. Pour un commentaire détaillé de cet arrêt voy. F. Raepsaet, « Les attentes raisonnables en matière de vie privée », J.T., 2011, n° 1094, pp. 145 et s.


Cet article a été précédemment publié par le même auteur dans le n° 514 du Bulletin Social et Juridique.(www.lebulletin.be)


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