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Le tribunal de la famille et de la jeunesse verra le jour en septembre 2014

Par Thierry Smets [LEGALEX Namur]

Jeudi 16.01.14

La loi du 30 juillet 2013 créant un tribunal de la famille et de la jeunesse entrera en vigueur le 1er septembre 2014.

Elle bouleversera considérablement les habitudes des praticiens puisque le contentieux familial est actuellement éparpillé entre plusieurs juridictions : le juge de paix, le tribunal de première instance ou le tribunal de la jeunesse. Le législateur a fort heureusement simplifié les choses en favorisant par la même occasion le recours aux modes alternatifs de règlement des conflits.

Concrètement, le tribunal de la famille et de la jeunesse fera partie du tribunal de première instance qui sera bientôt composé des sections suivantes :

• Le tribunal civil

• Le tribunal de la famille et de la jeunesse

• Le tribunal correctionnel

• Le tribunal de l'application des peines (si l'arrondissement judiciaire est également le siège d'une cour d'appel).

Le tribunal de la famille et de la jeunesse sera lui-même composé de trois types de chambres :

• Les chambres de la famille

• Les chambres de la jeunesse

• Les chambres de règlement à l'amiable

Les Cours d’appel seront réorganisées de la même manière.


Les compétences du Tribunal de la famille et de la jeunesse

Le tribunal de la famille et de la jeunesse sera compétent, de manière générale, pour connaître de tous les litiges de nature familiale. On vise ainsi :

• La cohabitation légale.

• Le mariage.

• Les questions portant sur l’application du régime matrimonial primaire (articles 212 à 224 du Code civil), en ce compris les contestations concernant le logement familial, les demandes de délégation de sommes et les mesures urgentes et provisoires à ordonner lorsque l'entente entre époux est sérieusement perturbée.

• Le divorce.

• Les mesures provisoires et urgentes à ordonner dans le cadre d’une procédure de divorce.

• L'autorité parentale, l'hébergement des enfants mineurs, le droit aux relations personnelles avec ceux-ci.

• Les pensions alimentaires.

• La filiation.

• L’adoption.

• Les successions, les donations, les testaments.

• La liquidation-partage.

La chambre de la jeunesse sera quant à elle compétente pour prendre toutes les mesures utiles pour protéger les mineurs en danger et les mineurs délinquants.

Le juge de paix reste toutefois compétent pour régler les questions relatives aux incapacités (interdiction, minorité, minorité prolongée, tutelle, administration provisoire, vente de biens appartenant aux mineurs) ainsi que pour les questions relatives à l'absence d’une personne (articles 112 et suivants du Code civil). On ne peut que le regretter : il aurait été plus cohérent et plus simple de TOUT attribuer au futur tribunal de la famille et de la jeunesse.


L’introduction de la procédure

La loi du 30 juillet 2013 favorise l'introduction des procédures par requête mais il restera néanmoins possible de lancer celles-ci par citation (ce qui permettra à la partie demanderesse de conserver la maîtrise de la date effective d’introduction).

Lorsque la demande concerne un mineur (hébergement, droit aux relations personnelles, contribution alimentaire), c’est le tribunal de la famille du domicile de ce mineur qui sera territorialement compétent.

Dans les autres cas, la demande devra nécessairement être portée devant le juge du domicile de la partie défenderesse ou devant le juge de la dernière résidence conjugale. Elle pourra exceptionnellement être introduite devant le juge du domicile de la partie demanderesse lorsqu’elle portera sur une pension alimentaire (sauf s’il s’agit d’une procédure de suppression ou réduction).

Une fois le tribunal de la famille saisi d’une demande, il restera territorialement compétent pour toute demande nouvelle. Dans l'intérêt du mineur concerné, le tribunal pourra toutefois décider de renvoyer la cause à un autre arrondissement judiciaire.

Ceci étant précisé, les parties pourront toujours décider de commun accord de saisir le tribunal de la famille de leur choix pour lui soumettre leur litige, sauf si un tribunal semblable aura déjà été saisi antérieurement.

Lorsque le litige requiert une solution urgente, une saisine permanente est prévue par le législateur : la cause restera indéfiniment inscrite au rôle et chaque partie pourra à tout moment faire revenir le dossier devant le tribunal, soit par la voie de conclusions, soit par simple lettre motivée au greffe (article 1253ter/7 du Code judiciaire).


La constitution du dossier familial

Dans la lignée de ce qui a été indiqué plus haut quant à la saisine permanente du tribunal de la famille, l’article 725 bis du Code judiciaire prévoit par ailleurs la constitution d’un dossier familial qui comprendra toutes les demandes familiales relatives aux personnes qui ont été mariées, qui ont vécu sous le régime de la cohabitation légale ou qui ont tout simplement un enfant commun. Il comprendra aussi les demandes relatives aux enfants dont la filiation est établie à l’égard de l’un des parents.

Il s’agira donc de tout centraliser pour que le juge familial puisse disposer d’un dossier complet reprenant l’historique complet de tous les litiges entre les parties.


La procédure

Lorsque les parties invoquent l'urgence, le tribunal de la famille statue « en référé ».

Les questions suivantes seront légalement réputées urgentes :

• Les autorisations de mariage.

• La fixation de résidences séparées lorsque l’entente est sérieusement perturbée.

• L’autorité parentale.

• L'hébergement des enfants mineurs.

• Les questions alimentaires.

• Les enlèvements internationaux d'enfants.

Lorsque la demande porte sur les résidences séparées, l'autorité parentale, l’hébergement des enfants, le droit aux relations personnelles ou les obligations alimentaires, les parties ne pourront pas se faire représenter par un avocat mais elles devront comparaître personnellement à l'audience d'introduction. Elles doivent également être présentes à l’audience de plaidoiries si la demande concerne un enfant mineur. C’est la solution qui, en pratique, est appliquée quotidiennement par la plupart des cours et tribunaux depuis plusieurs années. Elle reçoit ici une consécration légale.

Cette comparution personnelle des parties n’est cependant pas obligatoire s’il s’agit simplement d’entériner un accord rédigé par un avocat, un notaire ou un médiateur familial agréé.

De même, si le divorce est sollicité conjointement par les époux sur base de l'article 229, § 2 du Code civil, leur comparution personnelle n'est pas obligatoire non plus mais le juge peut toujours l’ordonner (article 1255, § 6 du Code judiciaire).

Enfin, la comparution des parties sera inutile dans le cadre de la procédure de divorce par consentement mutuel si les époux sont séparés de fait depuis 6 mois au moins à dater du jour du dépôt de la requête (article 1289, § 1 du Code judiciaire). Il s’agit, cette fois, d’une modification de ce qui se pratique aujourd’hui.


Les modes alternatifs de règlement des conflits

Nous l’avons signalé plus haut : le législateur a voulu favoriser les modes alternatifs de règlement des conflits en matière familiale.

Dès l’audience d’introduction, les parties recevront une information de base sur les modes alternatifs de règlement des conflits. Le greffe devra leur adresser une brochure d’information à ce sujet avec la liste des médiateurs familiaux agréés (article 1253ter du Code judiciaire).

Une chambre des règlements amiables sera par ailleurs instaurée au sein de chaque tribunal de la famille (et de chaque Cour d’appel). Elle sera composée de magistrats ayant suivi une formation spécifique en la matière.

L'article 731 du Code judiciaire prévoit que le dossier pourra être renvoyé à tout moment de la procédure devant une telle chambre, à la demande des parties ou du magistrat.

Si un accord total ou partiel intervient devant cette chambre, il pourra être homologué et recevoir la formule exécutoire.

Il va de soi que tout ce qui se négociera lors de ces audiences de règlement amiable restera strictement confidentiel. Le juge qui aura siégé en chambre de conciliation ne pourra d’ailleurs pas trancher lui-même le litige ultérieurement.

Les parties et/ou le juge conciliateur pourront toujours mettre fin à tout moment à la tentative de conciliation.



Thierry Smets
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Avocat au Barreau de Namur - www.avocats-legalex-namur.be




Source : DroitBelge.Net - Actualités - 16 janvier 2014


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