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Le point de départ du délai de réclamation en matière fiscale

Par François Collon [Dal & Veldekens]

Lundi 14.07.08

Le 19 décembre 2007, la Cour constitutionnelle a rendu un important arrêt relatif au point de départ du délai de réclamation en matière fiscale.

L’article 371 du Code des impôts sur les revenus prévoit que les réclamations doivent être motivées et introduites, sous peine de déchéance, dans un délai de six mois à partir de la date d'envoi de l'avertissement-extrait de rôle mentionnant le délai de réclamation.

Selon la Cour constitutionnelle, cet article 371 du Code des impôts sur les revenus est contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’il dispose que le délai de recours court à partir de la date d’envoi figurant sur l’avertissement-extrait de rôle mentionnant le délai de réclamation.

En effet, elle considère que le choix de la date d’envoi de l’avertissement-extrait de rôle comme point de départ du délai de recours apporte une restriction disproportionnée aux droits de défense des contribuables, les délais de recours commençant à courir à un moment où ces derniers ne peuvent pas avoir connaissance du contenu de l’avertissement-extrait de rôle. Ceci nous semble parfaitement logique.

Cet arrêt va néanmoins à l’encontre de l’interprétation stricte qui avait été donnée par la Cour de Cassation dans son arrêt du 15 juin 2001, qui estimait que le délai fixé par l’article 371 du Code des impôts sur les revenus, commençait à courir le lendemain de l’envoi réel de l’avertissement-extrait de rôle si cet envoi est régulier, cette date étant, sauf preuve contraire, celle qui figure sur l’avertissement-extrait de rôle.

Mais à partir de quelle date commence donc à courir le délai de réclamation ?

A cet égard, la Cour constitutionnelle indique que l’objectif d’éviter l’insécurité juridique pourrait être atteint si le délai commençait à courir le jour où le destinataire a pu en toute vraisemblance en avoir connaissance, c’est-à-dire le troisième jour ouvrable qui suit celui où l’avis d’imposition ou l’avertissement-extrait de rôle a été remis au service de La Poste, sauf preuve contraire du destinataire.

En ce faisant, la Cour Constitutionnelle renvoie à une application de l’article 53bis du Code Judiciaire qui dispose :

« A l’égard du destinataire, et sauf si la loi en dispose autrement, les délais qui commencent à courir à partir d’une notification sur support papier sont calculés depuis :

1) lorsque la notification est effectuée par pli judiciaire ou par courrier recommandé avec accusé de réception, le premier jour qui suit celui où le pli a été présenté au domicile du destinataire, ou, le cas échéant, à sa résidence et à son domicile élu.

2) lorsque la notification est effectuée par pli recommandé ou par pli simple, depuis le 3ème jour ouvrable qui suit celui où le pli a été remis au service de la Poste, sauf preuve contraire du destinataire.
»

Compte tenu du caractère discriminatoire reconnu par la Cour Constitutionnelle à l’art. 371 du CIR, il semble adéquat, en droit fiscal, de faire à présent application du droit commun et donc la disposition susvisée du Code Judiciaire

L’arrêt du 19 décembre 2007 pourrait permettre, à notre avis, à de nombreux contribuables ayant introduit tardivement une réclamation, de faire admettre la recevabilité de celle-ci.

L’arrêt paraît en effet exiger que le délai ne puisse prendre court avant le troisième jour ouvrable suivant celui où l’avertissement extrait de rôle a été remis au service de la poste. Or, l’administration fiscale, qui n’envoie pas les avertissements extraits de rôle par recommandé, est généralement dans l’impossibilité d’établir cette date.

Il se pourrait donc que l’administration doive déclarer recevable toutes les réclamations, quelle que soit leur date, introduites, dans le délai légal à partir du premier document établissant que le contribuable a eu connaissance de l’avertissement-extrait de rôle (rappel adressé par recommandé, exploit d’huissier, document émanant du contribuable et prouvant la connaissance de l’avertissement-extrait de rôle, etc.).

Cet arrêt, on en déjà fait l’expérience, devrait en tout cas permettre à bien des contribuables de faire face à la forclusion de leur réclamation invoquée par l’administration fiscale.



François Collon (fco@dalvel.com)
Avocat
Dal & Veldekens (www.dalveldekens.com)




Source : DroitBelge.Net - Actualités - 14 juillet 2008


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