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Une nouvelle loi sur la médiation

Par F. Van de Putte et P. Van Leynseele

Jeudi 24.02.05



[M.A.J: La loi du 21.02.05 modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne la médiation a été publiée au Moniteur Belge du 22.03.05].

Le 3 février, la chambre des représentants a adopté une loi modifiant le code judiciaire en ce qui concerne la médiation. Elle est actuellement soumise à la sanction royale. Elle sera publiée au Moniteur dans les prochaines semaines.

La médiation avait déjà reçu une consécration légale lors de l’adoption de la loi relative à la médiation familiale le 19 février 2001. Cette fois, le législateur lui réserve une place de choix, puisqu’il crée pour elle une septième partie dans le code judiciaire, intitulée « La médiation » et lui offre, par là, la même légitimité que la procédure judiciaire et l’arbitrage.

La loi ne définit pas la médiation.

Dans l’exposé des motifs, la médiation est présentée comme un processus de concertation entre parties désireuses d’y recourir sur une base volontaire (1). Il faut distinguer trois types de médiations. Les deux premiers sont relevés dans la loi :


- la médiation judiciaire : un médiateur agréé par la commission fédérale de médiation est désigné par le juge, à la demande des parties ou de sa propre initiative mais avec l’accord de celles-ci.

- La médiation volontaire : un médiateur agréé par la commission fédérale de médiation est choisi librement par les parties, qui signent un protocole et tentent une médiation. La médiation volontaire a lieu alors que les parties sont ou non déjà en procès.

- Et le troisième, implicitement, que nous qualifierons de médiation « libre » : un médiateur est choisi librement par les parties sans qu’il ne doive répondre aux exigences de la loi. C’est le modèle qui préexistait avant la loi et qui repose entièrement sur la volonté des parties.


Sous réserve de certaines dispositions, la loi ne s’applique qu’aux médiations qui se tiendront dans le cadre d’une procédure judiciaire ou dans un cadre volontaire mais à l’issue duquel, les parties souhaitent se réserver le droit de donner une force exécutoire à l’accord passé, ce par le biais d’une homologation par le juge.

Sans imposer que toutes les médiations répondent à ses critères, la loi réserve cependant l’avantage de la procédure d’homologation simplifiée aux parties qui ont fait appel à un médiateur agréé.


Généralisation de la médiation à d'autres matières que le droit familial

Alors que la médiation était réservée par la loi aux conflits familiaux, la nouvelle loi innove en étendant son champ d’application à un large éventail de litiges. Le législateur est parti du constat que le processus de médiation est pertinent dans tous les domaines, chaque fois que les parties acceptent d’y recourir de bonne foi.

L’expérience a démontré qu’elle était particulièrement adaptée à tous les conflits relationnels (famille, propriété, voisinage, milieu de travail, relations commerciales, difficultés en cours de construction conflits entre actionnaires ...).


Garanties offertes par la loi

Le législateur a voulu doter de garanties juridiques essentielles les médiations soumises à l’homologation du juge. Ceci afin d’alléger sa tâche, d’une part, et d’autre part afin de l’encourager à prescrire la médiation en toute confiance. Ainsi, la signature d’un protocole de médiation, la consignation par écrit de l’accord de médiation, le respect des règles de confidentialités et l’agréation du médiateur sont des dispositions qui répondent à ce souhait.

Le médiateur devra être compétent, garantir la sécurité juridique de ses écrits ; il devra être formé aux techniques de la médiation et son indépendance et son impartialité ne pourront être mises en doute.

En offrant ces garanties, l’allégement de la tâche du juge et par la même la résorption de l’arriéré judiciaire sont engagées.

La Commission fédérale de médiation, sera composée de représentants de tous les acteurs de la médiation (deux notaires, deux avocats et deux membres qui ne sont ni avocat, ni notaire).

Elle sera chargée notamment de l’agréation et de la formation des médiateurs. Cette Commission sera totalement indépendante, et aidée dans sa mission par trois sous-commissions spécialisées. (familiale, civile et commerciale et sociale). Elle bénéficiera de l’appui logistique du Service Public Fédéral de la Justice.


La médiation, un processus accessible à tous

La médiation sera accessible aux plus démunis. Le Code judiciaire a été modifié en ce sens. Les frais et honoraires des médiateurs pourront être pris en charge par l’assistance judiciaire, tant dans le cadre de la médiation judiciaire que dans le cadre volontaire.

Toutefois, étant rémunérés par l’Etat, les médiateurs intervenant dans le cadre de l’assistance judiciaire devront être agréés par la Commission de médiation. Un arrêté royal fixera le montant des honoraires et frais qui seront pris en charge par l’Etat.

Enfin, l’arrêté ministériel du 20 décembre 1999, fixant les modalités de paiement des avocats qui interviennent dans le cadre de l’aide juridique de 2ème ligne sera modifié afin que les prestations des avocats qui interviennent comme conseils des parties à une médiation soient inscrites dans la liste des points.


Innovations intéressantes


Le respect de la clause de médiation

Le législateur a relevé l’importance des engagements pris contractuellement par les parties avant la survenance même d’un litige en prévoyant que le juge ou l’arbitre puisse suspendre l’examen de la cause si les parties n’ont pas préalablement tenté la médiation alors qu’elles s’y étaient engagées (1725 C.j. nouveau).


La proposition de médiation vaut mise en demeure

Quel que soit le moment où la médiation est proposée par une partie à l’autre, si elle est faite par voie recommandée et qu’elle contient la réclamation d’un droit, la proposition de médiation aura les effets d’une mise en demeure (art. 1730§2 C.j. nouveau).

Le législateur a assimilé cet envoi recommandé à une mise en demeure pour que le demandeur de médiation puisse à la fois marquer le point de départ du cours des intérêts sans que le contenu de sa lettre ne soit susceptible de heurter de front la partie adverse.


Suspension de la prescription (1730 par.3 nouveau)

Autre effet de la lettre contenant une proposition de médiation : elle suspend la prescription. Ici aussi, le but est de favoriser les médiations en permettant aux parties qui souhaitent la tenter de ne pas craindre l’imminence de l’expiration d’un délai de prescription extinctive de leur action.

Cette suspension sera, dès l’envoi de la lettre recommandée, d’un délai d’un mois (art. 1730 §3 C.j. nouveau). Ce délai est censé être celui nécessaire aux parties pour se concerter quant au principe de la médiation et pour mettre au point le protocole de médiation si elles souhaitent tenter l’expérience.

Si la médiation n’est pas mise sur pied, le délai reprendra son cours un mois après la date du début de sa suspension.

Si un protocole de médiation conforme aux conditions requises pour les médiations volontaires est signé, cette signature suspendra à nouveau la prescription, cette fois pour la durée de la médiation (art. 1731§3 C.j.) plus (sauf accord en sens contraire des parties, un délai de « un mois après la notification faite par l’une des parties ou par le médiateur à l’autre ou aux autres parties de leur volonté de mettre fin à la médiation. Cette notification a lieu par lettre recommandée. » (art. 1731§4 C.j.)


Entrée en vigueur et dispositions transitoires

Afin que la loi puisse être appliquée dans les meilleurs délais, conscient qu’en pratique des médiateurs satisfont déjà aux conditions visée à l’article 1726 de la loi, le législateur a prévu une période transitoire d’un an.

Pendant cette période, les instances qui seront reconnues par la commission fédérale de médiation comme offrant les garanties suffisantes pour n’agréer que des médiateurs qui répondent aux conditions prévues par l’article 1726, pourront elles-mêmes accorder un agrément temporaire.

Celui-ci sera valable pendant deux ans. Il est vraisemblable, puisque la loi prévoit que la commission sera composée de représentants de la Fédération des notaires et des Ordres des barreaux, que ces deux instances figureron manière plus fréquente et détaillée permettent dès lors d’appréhender avec plus de précision la valeur réelle du patrimoine de la société, les risques qu'elle encoure et l'évolution de son marché.

Ces réformes ont des incidencesa??


Source : DroitBelge.Net - Actualités - 24 février 2005


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