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Quelles sont les conséquences fiscales de la DLU ?

Par Par E. Boigelot et F. Collon

Lundi 30.08.04



1. Le caractère définitivement libératoire de la déclaration

L’article 3 de la loi du 31 décembre 2003 instaurant la DLU prévoit que :

« Les sommes, capitaux ou valeurs mobilières déclarés sont, après paiement de la contribution unique due […], réputés de manière irréfragable avoir fait définitivement et complètement l’objet de tous impôts, cotisations sociales […], majorations d’impôts, majorations de cotisations sociales, intérêts de retard et amendes qui sont dus ou auraient pu être dus pour ces sommes, capitaux ou valeurs mobilières, avant la date de l’introduction de la déclaration.

Ceci vaut tant dans le chef du déclarant et de ses auteurs que dans le chef des personnes physiques ou morales desquelles ces sommes, capitaux ou valeurs mobilières ont été obtenus directement ou indirectement ou qui ont attribué ces sommes au dclarant ou à son auteur, de quelque façon que ce soit. »


La déclaration libératoire unique, accompagnée du paiement de la contribution, a donc pour effet que les sommes, capitaux ou valeurs mobilières déclarés sont réputés, de manière irréfragable, avoir fait l’objet de leur régime fiscal et social. Cet effet libératoire porte également sur les amendes, intérêts de retard et majorations d’impôts.

Le caractère libératoire vaut tant dans le chef du déclarant (personne physique – voir « Qui peut faire une DLU ? ») et de ses auteurs (le donateur, le défunt, …) que dans le chef des personnes morales par l’intermédiaire desquelles ces sommes, capitaux ou valeurs mobilières ont été obtenus.

Ainsi un contribuable peut parfaitement établir une déclaration libératoire unique et bénéficier de son effet libératoire lorsque les fonds ayant produit les revenus déclarés proviennent, par exemple, d’un don fait par ses parents qui ne peuvent justifier l’origine de ce don.

En ce qui concerne les droits de successions, qui ressortent de la compétence des régions en Belgique, deux décrets ont été adoptés en régions wallonnes et de Bruxelles-Capitale afin d’assurer également l’application de l’effet libératoire à ces droits.

En ce qui concerne la région flamande, il a été décidé, dans le cadre de la négociation du nouvel exécutif suite aux élections du 13 juin dernier, qu’aucun décret ne serait pris. Le nouveau ministre-président flamand, M. Yves Leterme, considère, en effet, qu’un tel décret n’est pas nécessaire dans la mesure où, sur la base de l’article 5 de loi du 31 décembre 2003, il ne peut y avoir d’enquête ou d’opération de contrôle.

Hormis le fait que cette interprétation est partiellement erronée, l’absence de décret en région flamande ne contribuera certainement pas à encourager les contribuables flamands à régulariser leur situation fiscale.


2. La contribution unique

Deux taux sont d’application selon le type d’actifs régularisés : 6 ou 9 %.

Le taux de 9 % s’applique :

- aux sommes, capitaux et valeurs mobilières inscrits en compte à l’étranger (1ère catégorie d’actifs visés par la loi - pour plus de détails sur la nature de ces actifs, voir « Que peut-on déclarer ? »)

- aux valeurs mobilières qui ne se trouvent pas en compte (2ème catégorie d’actifs visés par la loi – pour plus de détails, voir « Que peut-on déclarer ? »)

Dans le premier cas, le déclarant peut, après paiement de la contribution de 9 %, disposer totalement librement des actifs déclarés.

Dans le second cas, il est néanmoins tenu de déposer sur un compte ouvert à son nom les valeurs mobilières régularisées lesquelles doivent y rester bloquées pendant trois ans.

Toutefois, en cas de vente ou de remboursement de ces valeurs, il est possible de les réinvestir pendant 30 jours. Un arbitrage est donc possible.

En cas de non-respect de la période de blocage de trois, une contribution complémentaire de 6% est due, nous y reviendrons ci-après.

Cette période de blocage de trois ans est évidemment très pénalisante pour les contribuables qui souhaiteraient, dans le cadre d’une planification successorale par exemple, disposer immédiatement des fonds.

En cas de décès du déclarant, les héritiers ne doivent toutefois pas respecter ce délai de blocage.

Le taux de 6 % ne s’applique qu’aux sommes, capitaux et valeurs mobilières autres que les titres au porteur (actifs de la 1ère catégorie) et à la condition que les sommes ainsi rapatriées soient investies dans les trente jours suivant l’introduction de la déclaration.

Les investissements autorisés sont :

1. l’achat, la construction et/ou la rénovation d’immeubles bâtis sis dans un Etat membre de la Communauté européenne ;

2. l’achat ou la constitution d’immobilisations corporelles, autres que des immeubles, des voitures, voitures mixtes, minibus et la configuration complète de PC et de périphériques, affectées à l’exercice d’une activité professionnelle qui produit des revenus visés à l’article 23, §1er, 1° (bénéfices) ou 2° (profits) du Code des impôts sur les revenus 92 ;

3. la souscription et la libération en numéraire d’actions ou parts émises par des sociétés à l’occasion de leur constitution ou de l’augmentation de leur capital autrement que par appel public à l’épargne, lorsque ces actions ou parts sont au nom du déclarant ou sont déposées sur un compte au nom du déclarant ;

4. l’achat, la souscription et la libération en numéraire de valeurs mobilières visées à l’article 2, 1°, a) à d), de la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers (pour plus de détails, voir « Que peut-on déclarer ? ») , y compris les titres de sociétés non cotées, lorsque ces valeurs mobilières sont au nom du déclarant ou déposées sur un compte au nom du déclarant ;

5. les dépôts d’argent au nom du déclarant, à l’exclusion des dépôts d’épargne visés à l’article 21,5° du Code des impôts sur les revenus 1992 (le livret d’épargne avec exonération des premiers 1.520 € d’intérêts). Le placement des sommes sur un compte à vue est possible pour une période maximale de trois mois ;

6. le payement d’une prime lors de la conclusion d’un contrat d’assurance sur la vie ou un contrat de capitalisation conclu auprès d’une entreprise d’assurance.

Les fonds ainsi investis seront bloqués pendant trois ans mais les actifs pourront toujours être arbitrés sous condition de réinvestissement. Le prix net de cession ou le remboursement net obtenu doit être réinvesti dans un délai de 30 jours dans des investissements reconnus pour la période subsistante des trois ans.

En cas de non-respect de la période de blocage de trois, une contribution complémentaire de 6% est due (voir ci-après).

En cas de décès du déclarant, les ayants droits doivent continuer à satisfaire à l’obligation d’investissement pendant la période subsistante des trois ans.


3. La contribution complémentaire de 6%, la garantie et sa suspension

Comme déjà mentionné, le non-respect de la période de blocage de trois ans et de l’investissement durant cette période est sanctionné par le paiement d’une contribution complémentaire de 6 %.

L’article 3 de l’arrêté royal du 9 janvier 2004 prévoit que cette contribution complémentaire doit faire l’objet d’une garantie. Celle-ci doit être constituée au moment du paiement de la contribution unique soit :

- auprès de l’établissement de crédit, la société de bourse ou l’entreprise d’assurance établis en Belgique auprès duquel la déclaration a été introduite sous la forme du blocage d’un montant équivalent à la contribution complémentaire due à titre de garantie ;

- auprès de l’Administration de la Trésorerie sous la forme d’une sûreté réelle, d’une garantie bancaire ou d’une autre sûreté personnelle pour un montant équivalent à la contribution complémentaire due.

Les sommes, capitaux ou valeurs mobilières ainsi bloqués à titre de garantie sont définitivement acquis au Trésor au 1er juillet 2008, à moins que la personne qui a introduit la déclaration ou son ayant-droit ne démontre, à partir du 1er février 2008 et, au plus tard, au 30 juin 2008, que l’obligation de dépôt ou d’investissement prévue par la loi a été remplie.

Les contestations relatives à la recevabilité ou à la validité des preuves soumises dans le cadre de cette disposition entre l’intermédiaire financier et la personne qui a introduit sa déclaration sont soumises à la requête d’une des parties concernées, dans les 60 jours, à un collège spécial.

Très récemment, le Conseil d’Etat a toutefois suspendu l’article 3 de l’arrêté royal du 9 janvier 2004 en considérant que seule une loi pouvait instituer ce collège spécial.

Les réactions et commentaires suite à ce nouveau coup dur pour la DLU n’ont pas tardé.

Certains (dont Hendrik Bogaert, député CD&V et auteur du recours) considèrent que le taux favorable de 6 % est purement et simplement exclu et que seul le taux de 9 % pourra désormais s’appliquer.

D’autres, dont le Ministre des Finances, considèrent que cette suspension ne rend la DLU que plus attractive dans la mesure où elle supprime la contrainte d’un dépôt de garantie. Cette dernière position doit être suivie.

Les effets de cette suspension consistent, pour le moment, en ce que les banques ne sont plus habilitées à exiger des déclarants qu'ils constituent une garantie de 6% sur un compte bloqué.

Les déclarants pourraient volontairement mettre un montant en garantie mais ils peuvent tout aussi bien s'en dispenser. Plus rien ne les oblige, à ce jour, à constituer une telle garantie.


4. Les conséquences fiscales de l’absence de DLU

Outre le paiement de l’impôt éludé, de majorations, d’éventuelles amendes et le risque de poursuites pénales, les contribuables qui n’ont pas procédé à une DLU et qui sont « pris », seront soumis à partir du 1er janvier 2005 à un très lourd accroissement d’impôt fixé à au moins 100 %.

Dans le cas où ce seraient des droits de succession qui ont été éludés, le contribuable pourrait donc se voir réclamer par le fisc des impôts plus élevés que les montants hérités compte tenu de la hauteur de ces droits.



Prochaine contribution : Quelles sont les conséquences pénales d’une DLU ?



Eric Boigelot
François Collon
Avocats
Dal & Veldekens












Le cycle DLU sur DroitBelge.Net:

Eric Boigelot
&
François Collon


(Dal & Veldekens)


La DLU: une amnistie fiscale "à la belge"

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Source : DroitBelge.Net - 30 août 2004


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