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Introduction



Les constructeurs automobiles et les producteurs de pièces détachées commercialisent généralement leurs produits via des réseaux de distributeurs. Les distributeurs de véhicules automobiles sont couramment dénommés "concessionnaires". Les constructeurs automobiles et les autres entreprises liées au secteur automobile mettent également en place des réseaux de réparateurs agréés. Sur le plan juridique, ces réseaux de distribution et de réparation se concrétisent pat un ensemble d'accords similaires entre le constructeur et chacun de ses distributeurs ou réparateurs.

Au regard du droit de la concurrence, ces accords sont qualifiés d'accords verticaux, puisque le constructeur, d'une part, et le distributeur ou le réparateur, d'autre part, opèrent chacun à un niveau différent de la chaîne de commercialisation.

L'article 81 §1 du traité CE interdit les accords (notamment les accords verticaux) qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres et qui empêchent, restreignent ou faussent la concurrence dans l'Union européenne.

- L'article 81 du traité CE ne s'applique que si l'accord concerné est susceptible d'avoir un effet sensible sur le commerce entre Etats membres, ce qui est généralement le cas d'un réseau de distribution qui couvre l'intégralité du territoire d'un Etat membre. En toute hypothèse, même si l'accord en question n'a pas d'effet au-delà d'un territoire national et est donc soumis au seul droit national de cet Etat, les principes applicables seront très similaires, le droit national de la concurrence des Etats membres s'inspirant très largement du droit communautaire;

- L'accord entre un constructeur automobile et son distributeur qui détermine le la quantité de véhicules que le distributeur doit vendre sur un territoire déterminé et le prix auquel ces véhicules doivent être revendus sont des accords restrictifs de concurrence qui sont, en principe, nuls.

L’article 81 §3 du traité CE prévoit cependant que cette interdiction ne s'applique pas aux accords dont les effets positifs (gains d'efficience dans la production ou la distribution des produits, promotion du progrès technique ou économique) l'emportent sur les effets anticoncurrentiels, et ce, à condition que les consommateurs (et pas seulement les parties à l'accord) bénéficient équitablement du profit qui résulte des améliorations apportées. Les accords restrictifs de concurrence qui remplissent ces conditions sont dits "exemptés".


En principe, les entreprises doivent examiner leurs accords restrictifs de concurrence et vérifier s'ils peuvent être considérés comme valides. Les entreprises concernées procèdent à cette analyse individuelle sous leur propre responsabilité (note 1) . Leur appréciation est susceptible d'être contrôlée a posteriori par les autorités de concurrence (nationales et communautaires) si elles sont saisies d'une plainte d'un tiers ou si elles mènent une enquête d'office sur les pratiques concurrentielles des entreprises concernées. La licéité d'un accord ayant un impact sur la concurrence peut également être soulevée devant le juge judiciaire et tranchée par ce dernier lorsqu'il est amené à connaître d'un litige dans lequel cet accord est invoqué par l'une des parties.

Les "règlements d'exemption" (note 2 - Voir glossaire) adoptés par la Commission européenne ("la Commission") peuvent toutefois faciliter la tâche des entreprises à cet égard. En effet, les règlements d'exemption fixent, pour certaines catégories d'accords, les conditions à remplir pour que ces derniers soient présumés remplir les conditions d'exemption de l'article 81 §3 du traité CE et être donc considérés comme valides au regard du droit de la concurrence.

La Commission a ainsi adopté un règlement d'exemption par catégorie qui concerne les accords verticaux en général (note 3) . Eu égard aux particularités du secteur automobile et à certaines dérives constatées dans la mise en œuvre des réseaux de distribution, la Commission a cependant jugé nécessaire de prévoir un règlement d'exemption spécifique en matière automobile, plus strict que le régime général (note 4) .

Le secteur automobile fait donc l'objet d’un règlement spécifique d'exemption par catégorie: le règlement 1400/2002 de la Commission du 31 juillet 2002 concernant l'application de l'article 81 §3 du traité CE à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile (ci-après le "Règlement") (note 5) . Le Règlement est applicable dans les pays de l’Espace Economique Européen (EEE), à savoir les 27 Etats membres de l’Union européenne, plus la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein.

Le Règlement est entré en vigueur le 1er octobre 2002 et expirera le 31 mai 2010.





Bénédicte Raevens (Avocat associé au cabinet McGuireWoods Bruxelles)

Pol Cools (Avocat au cabinet McGuireWoods Bruxelles)





Notes:

(1) Avant le 1er mai 2004, la situation des entreprises étaient beaucoup plus confortable: elles devaient notifier leurs accords restrictifs de concurrence à la Commission européenne qui procédait à une analyse des accords notifiés et décidait de leur (in)compatibilité avec les principes du droit de la concurrence. Un mécanisme similaire était prévu en droit belge pour les accords n'ayant pas d'effet au-delà du territoire belge.

(2) Voir glossaire.

(3) Règlement 2270/99 de la Commission du 22 décembre 1999 concernant l'application de l'article 81 §1 du traité CE à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées, J.O. L 336, 29.12.1999, p. 21. Voir Fiche Pratique sur le sujet.

(4) Ainsi par exemple, la possibilité de lier un système de distribution sélective avec une exclusivité territoriale, prévue par le précédent règlement d'exemption en matière de distribution automobile et par le règlement général d'exemption des accords verticaux, est considérée comme un obstacle majeur à la concurrence entre concessionnaires automobiles.

(5) J.O. L 203, 01.08.2002, pp. 30-41.




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