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La responsabilité du fait d'autrui: introduction



A. Absence d’un principe général de responsabilité du fait d’autrui

En droit civil belge, la responsabilité (extra-contractuelle) du fait d’autrui trouve sa consécration principalement dans l’article 1384 du Code civil dont l’alinéa 1 énonce : « On est responsable, non seulement des dommages que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre. »

D’aucun pourrait reconnaître dans cette disposition légale un principe général. Pourtant, selon la Cour de Cassation, il n’en est rien.

Par un arrêt du 19 juin 1997, la Cour de Cassation a en effet décidé que « l’article 1384 du Code civil n’établit pas, dans son alinéa 1, un principe général de responsabilité du fait d’autrui (…) ; que cette responsabilité n’existe que dans les limites des régimes particuliers, différents les uns des autres, qu’il instaure de manière exhaustive dans les alinéas suivants ».

Ainsi, c’est de manière limitative que les alinéas 2, 3 et 4 de l’article 1384 du Code civil consacrent respectivement la responsabilité des parents du dommage causé par leurs enfants mineurs, celle des maîtres et des commettants du dommage causé par leurs domestiques et préposés et celle des instituteurs et des artisans du dommage causé par leurs élèves et apprentis.

Comme pour combler l’absence d’une règle générale de responsabilité du fait d’autrui, la jurisprudence a été amenée, au fil du temps, à étendre de plus en plus le champ d’application des régimes particuliers de responsabilité instaurés dans ces trois alinéas. Cette évolution jurisprudentielle s’explique sans doute par le souci d’indemnisation de la victime.


B. Distinction entre deux systèmes de responsabilité

Les régimes particuliers de responsabilité instaurés par l’article 1384 du Code civil peuvent être divisés en deux catégories.

La première catégorie concerne la responsabilité des personnes qui ont un devoir de surveillance d’autrui. En cas de dommage causé par la personne qu’on devait surveiller, la victime peut s’adresser au surveillant. La responsabilité de ce dernier est fondée sur une faute prouvée ou présumée. Ce régime de responsabilité s’applique notamment aux parents d’enfants mineurs et aux instituteurs (alinéas 2 et 4 de l’article 1384 du Code civil).

La deuxième catégorie concerne la responsabilité du fait des personnes que l’on s’est substituées. Il s’agit de la responsabilité du fait des aides, substituts, préposés et autres agents d’exécution (alinéa 3 de l’article 1384 du Code civil).

L’importante distinction entre ces deux catégories se situe au niveau de la notion de faute. Dans la première catégorie, la responsabilité du surveillant repose sur sa faute prouvée ou présumée. Le surveillant peut se libérer en démontrant qu’il n’a commis aucune faute ou que sa faute n’est pas en relation causale avec le dommage. En revanche, dans la deuxième catégorie, on ne se soucie guère de la faute personnelle du débiteur de l’indemnité. On peut donc parler d’une responsabilité objective ou encore d’une responsabilité absolue.

Cette distinction découle du texte même de l’article 1384 du Code civil, qui, dans son alinéa 5, n’autorise la preuve contraire de la présomption de responsabilité qu’en ce qui concerne les parents, l’instituteur et l’artisan. Il s’ensuit que le commettant ne peut s’exonérer de sa responsabilité.





Jean-Luc Fagnart & Estelle Delaunoy
Avocats au barreau de Bruxelles

Cabinet Thelius




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