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Livre II : Dispositions communes aux personnes morales (13) – le règlement d’ordre intérieur



Une nouveauté notable du CSA concerne la possibilité pour les personnes morales d’adopter un règlement d’ordre intérieur. Cette possibilité n’est pas neuve et il est vrai que bon nombre de sociétés et d’associations avaient déjà, avant l’adoption du nouveau Code, adopté ce type de règlement afin d’organiser le fonctionnement interne de la société ou de l’association.

Cependant, cette faculté n’était pas prévue par l’ancien Code, de sorte que le nouveau CSA vient consacrer la validité juridique de ce type de règlement interne dont la portée était auparavant incertaine.

Un règlement d’ordre intérieur peut être très utile en pratique. Tout d’abord, ce règlement peut permettre d’éviter d’alourdir inutilement les statuts, en réglant des questions très diverses qui ne doivent pas figurer obligatoirement dans les statuts en vertu du CSA, tel, par exemple, que le mode de fonctionnement du conseil d’administration (règles de délibération, répartitions des tâches, etc.). Le règlement d’ordre intérieur peut également organiser les pratiques quotidiennes de la société, ainsi que son objectif, sans toutefois que les actionnaires ou associés doivent donner à ces règles la force impérative qui est celle des statuts ou des décisions des organes de la société.

Ainsi, le nouvel article 2:59 du CSA introduit la possibilité pour l’organe d’administration d’édicter un règlement d’ordre intérieur, à condition que cette possibilité soit prévue par les statuts de la personne morale. Selon l’exposé des motifs, il n’empêche pas que les statuts puissent explicitement attribuer ce pouvoir à l’assemblée générale (Doc. Parl., Ch. repr., sess. ord. 2017-2018, n° 54-3119/001, p. 75).

Pareil règlement d’ordre intérieur ne peut toutefois contenir de dispositions :

• contraires à des dispositions légales impératives ou aux statuts (art 2:59, 1°) ;

• relatives aux matières pour lesquelles le nouveau code exige une disposition statutaire (art 2:59,2°) ; et

• touchant aux droits des associés, actionnaires ou membres, aux pouvoirs des organes ou à l’organisation et au mode de fonctionnement de l’assemblée générale (art 2:59, 3°).

Toutefois, il est prévu par le nouveau Code que le règlement d’ordre intérieur dans une société coopérative peut déroger aux deux dernières exceptions prévues ci-dessus. En effet, l’article 6:69, §2 du CSA permet aux statuts d’une société coopérative de prévoir la rédaction d’un règlement d’ordre intérieur contenant des dispositions « concernant les droits des actionnaires et le fonctionnement de la société, y compris les matières visées à l’article 2:59, 2° et 3° », pour autant que ce règlement d’ordre intérieur soit approuvé par une décision prise dans le respect des conditions de quorum et de majorité requises pour la modification des statuts. Par conséquent, le règlement d’ordre intérieur d’une SC peut en principe contenir toute disposition quelle qu’elle soit, à la seule exception des dispositions qui seraient contraires à des dispositions légales impératives ou aux statuts (1ère exception) conformément à l’article 2:59, alinéa 1er, 1°, CSA.

Il en résulte donc que le contenu du règlement d’ordre intérieur peut être différent selon la forme de société visée.

Cette différence de traitement a été soumise à la Cour constitutionnelle qui s’est prononcée dans un arrêt n° 135/2020 rendu le 15 octobre 2020.

La Cour a considéré que l’article 2:59, 3° du CSA violait les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu’il impose des conditions strictes pour édicter un règlement d’ordre intérieur, alors qu’un régime plus souple s’applique uniquement à la société coopérative, et a dès lors annulé cet article.

Du fait de cette annulation, un règlement d’ordre intérieur peut contenir des dispositions « touchant aux droits des associés, actionnaires ou membres, aux pouvoirs des organes ou à l’organisation et au mode de fonctionnement de l’assemblée générale ». Ceci ne peut toutefois être autorisé qu’à condition que le règlement d’ordre intérieur soit approuvé - comme exigé pour la société coopérative – par une décision prise dans le respect des conditions de quorum et de majorité requises pour une modification des statuts.

Le règlement d’ordre intérieur et toute modification apportée à celui-ci sont communiqués aux associés, actionnaires ou membres selon le mode de communication choisi en vertu de l’article 2:32 du CSA ou mis à leur disposition sur le site internet de la personne morale.

De plus, les statuts doivent renvoyer à la dernière version du règlement d’ordre intérieur, de manière à ce que les associés, actionnaires ou membres actuels et futurs aient conscience de son éventuelle existence. L'organe d'administration peut adapter cette référence dans les statuts et la publier.




Caroline Kempeneers
Avocate - Médiatrice agréée en matière civile et commerciale
Solis Law Firm


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